Bruno Retailleau : « Le laxisme migratoire est une bombe. »
ENTRETIEN dans le Point du 25 avril 2021. Propos recueillis par Jacques Paugam.
Au lendemain de l’attaque qui a coûté la vie à une fonctionnaire de police à Rambouillet, le sénateur LR fustige l’incurie du gouvernement. Après la mort d’une fonctionnaire de police, tuée vendredi par un homme armé d’un couteau à Rambouillet (Yvelines), le président du groupe Les Républicains au Sénat, Bruno Retailleau, en déplacement en Arménie aux côtés de Gérard Larcher, ne mâche pas ses mots. L’auteur des faits, abattu par un autre agent, est un homme de nationalité tunisienne de 36 ans, en situation régulière, inconnu des services de police et de renseignements. Une enquête a été ouverte par le Parquet national antiterroriste (Pnat). Bruno Retailleau somme l’État, jusqu’ici d’une « impuissance coupable », de contre-attaquer : « En période de guerre, le « en même temps », c’est la défaite assurée », affirme-t-il.
Le Point : Que vous inspire ce nouveau drame ?
Bruno Retailleau : Une détermination implacable à vaincre le totalitarisme islamique. Tous les Français doivent s’en persuader : nous devons et nous pouvons vaincre la barbarie à condition que nous nous en donnions enfin les moyens. La France ne doit plus céder un millimètre de terrain aux islamistes. Combien de morts allons-nous encore devoir supporter avant que nos gouvernants ne se décident à mener une guerre totale contre l’ennemi ? Aujourd’hui, l’État est d’une impuissance coupable : l’auteur de l’assassinat a été régularisé après dix ans de clandestinité ! Si cet individu avait été expulsé comme il se devait, la policière serait encore vivante. Le laxisme migratoire est une bombe placée au cœur de notre pays.
Une fois de plus, si l’hypothèse terroriste devait se confirmer, c’est la République qui est visée à travers ses représentants…
Aujourd’hui une policière, hier un professeur, avant-hier un officier de gendarmerie. C’est évidemment la République qui est touchée au cœur quand on s’attaque à ses représentants. Mais les victimes, ce furent aussi un prêtre, des journalistes, des Français dans une salle de spectacle ou en terrasse. Au-delà de la République, c’est donc la France qui est visée. Il faut être très clair : c’est une guerre de civilisation qui est livrée à la France par la barbarie islamiste et c’est donc aussi sur le terrain de la défense de notre identité, de nos coutumes, de nos valeurs, de notre mode de vie que nous devons nous battre. C’est ce que le macronisme n’a toujours pas compris : le gouvernement a refusé de traiter, dans sa loi sur le séparatisme les deux questions pourtant essentielles de l’immigration et de l’assimilation. Rien, par exemple, sur le voile des accompagnantes scolaires et même des petites filles. Et pourtant, si toutes les femmes voilées ne sont évidemment pas des djihadistes, tous les djihadistes exigent que les femmes portent le voile. Il faut combattre le terrorisme, mais il faut aussi combattre le terreau du terrorisme : les provocations communautaristes ne sont plus acceptables car elles alimentent le « djihadisme d’atmosphère » dont parle Gilles Kepel . C’est aussi la raison pour laquelle Emmanuel Macron a tort de pratiquer la repentance, car il souffle sur les braises d’un sentiment anti-français dans les quartiers. À cultiver la honte de soi, on ne récolte que la haine des autres.
Il y a une semaine, le président de la République rappelait dans Le Figaro qu’il se battait pour « le droit à la vie paisible » . Ce nouveau drame illustre-t-il, selon vous, l’échec de sa politique ?
Au-delà d’Emmanuel Macron, les Français paient au prix du sang des années de laxisme migratoire et judiciaire. Mais force est de constater qu’Emmanuel Macron ne l’a pas compris. La loi Collomb a permis de faciliter l’immigration familiale, les prisons promises n’ont toujours pas été construites et nous avons un ministre de la Justice qui parle de « sentiment d’insécurité ». Aujourd’hui, Emmanuel Macron s’est lancé dans une opération de communication, mais le logiciel reste le même. En période de guerre, le « en même temps », c’est la défaite assurée. Ne nous y trompons pas : ce qui se joue dans les années qui viennent, c’est la survie de la France en tant que nation.
Quelles mesures d’urgence préconisez-vous pour lutter contre le terrorisme ?
La première chose à faire, c’est de modifier notre droit pour expulser tous les étrangers qui séjournent illégalement sur notre territoire. Quant aux binationaux délinquants, il faut qu’ils soient déchus de leur nationalité française puis expulsés. Si les pays d’origine ne veulent pas reprendre leurs ressortissants, la France doit en tirer les conséquences, sur les visas comme sur les aides au développement. L’angélisme, ça suffit. Ce qui me révolte, c’est que nos services de renseignements, nos policiers, nos militaires font un travail remarquable pour traquer et neutraliser l’ennemi, mais, parce que nos frontières ne sont pas tenues et que notre droit est trop laxiste, nos lignes sont régulièrement enfoncées. Il nous reste très peu de temps désormais, car l’ennemi n’est pas seulement à nos portes, il est déjà parmi nous. Ne nous y trompons pas : ce qui se joue dans les années qui viennent, c’est la survie de la France en tant que nation et celle de l’Europe en tant que civilisation.